Notre lettre ouverte à Vincent Peillon

 

 

 

                                                                                                                         Le 19 décembre 2012

                                                                                

 

                                                                                                                         Monsieur Vincent PEILLON

                                                                                                                         Ministre de l'Éducation nationale

                                                                                                                         110 rue de Grenelle

                                                                                                                         75007 Paris

 

Monsieur le Ministre,

En prononçant, le 9 octobre 2012, le Discours de clôture de la concertation sur l'École, Monsieur le Président de la République a exprimé l'idée que le temps de la décision ne met pas fin à celui de la concertation.

Je m'autorise de la conviction ainsi exprimée au plus haut de l'État, pour vous présenter quelques remarques sur le Projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, son Exposé des motifs et son Rapport annexé.

Ayant présidé pendant seize ans la Société des agrégés de l'Université, dont j'ai été, par l'Assemblée générale du 11 juin 2006, élue le président d'honneur, je me fais un devoir d'indiquer que, selon les statuts de cette association, « seul le président en exercice a qualité pour engager la Société, la représenter [...] ou parler en son nom ».

La présente lettre n'a donc pas la prétention d'engager cette association.

Cette lettre, chez une personne longuement dévouée à l'institution scolaire, correspond au souci, personnel, de vous faire part, respectueusement et franchement, des vives inquiétudes qu'engendrent ces textes, rapportés à la préoccupation majeure exprimée le 9 octobre par Monsieur le Président de la République, à savoir que les choix préparés « puissent être considérés comme utiles au pays » et propres à garantir « une école de haute qualité ».

Afin de faciliter l'examen de mes remarques, je me suis permis de les grouper ci-après.

La présente lettre ainsi que les remarques jointes seront éventuellement rendues publiques.

D'avance je vous remercie pour l'attention qui pourra leur être accordée.

Veuillez, je vous prie, Monsieur le Ministre, agréer l'expression de ma haute considération,

                                          

Geneviève ZEHRINGER

 

PJ: REMARQUES sur le Projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République .

 

 


 

 

GENEVIÈVE ZEHRINGER                                     LE 19 DÉCEMBRE 2012

 

 

 

REMARQUES

SUR LE

PROJET DE LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION

POUR LA REFONDATION DE L'ÉCOLE DE LA RÉPUBLIQUE

[jointes à la lettre à Monsieur le Ministre de l'éducation nationale]

 

 

 

 

I.-SUR LA « CONCERTATION »:

 

Ce n'est certes pas la première fois que le Ministère de l'Éducation nationale entreprend de faire valoir, à l'appui d'un projet politique, de prétendues « tendances sociétales lourdes ». Elles sont le plus souvent opposées aux témoignages qualifiés du personnel enseignant, et à ses objections, lesquelles reposent pourtant sur son expérience directe (immédiatement reprochée comme la preuve d'un manque de recul), à l'annonce d'une réforme, dont la mise en œuvre confirmera une fois encore la nocivité.

   Prenons ici l'exemple du « socle commun » auquel le Rapport de la concertation accorde une fonction de « principe organisateur ». En 2005 déjà, à l'occasion de la présentation du « socle commun » inscrit dans la « Loi Fillon », une Fiche historique intégrée au Dossier de presse, et intitulée La riche histoire du socle commun, voulait montrer la « lente maturation » de la notion de socle commun, comme si cette notion s'était construite d'elle-même, et comme si sa définition allait de soi. Ce que la Fiche historique révélait en réalité, confirmant la nature politique de l'entreprise, et la fonction politique de la notion choisie pour la traduire, était la longue liste des rapports officiels commandés à l'échelon gouvernemental afin de promouvoir la dite notion, dont la « maturation » n'avait par conséquent absolument rien de spontané (rapports de MM. Lesourne en 1987, Bourdieu et Gros en 1989, Bouchez en 1993, Ferry en 1994, Fauroux en 1996, Thélot en 2004). Le  Ministère avait entre-temps fait connaître sa faveur pour le « principe » inscrit en 2001 dans le rapport du Conseil européen: « La société attend de l'éducation et de la formation qu'elles permettent à chacun et à chacune d'acquérir les compétences de base nécessaires pour affronter la vie et le travail ». Notons qu'il n'était pas ici question de connaissances.

Mais il s'agissait de travaux commandés à des personnes d'influence, lesquelles,  après avoir recueilli divers avis, livraient leur analyse.

Or, en 2012, le Ministère de l'Éducation nationale avait annoncé une « concertation », dont chacun aurait dû pouvoir légitimement espérer qu'elle irait au fond des choses, qu'elle ferait ressortir les divergences de vues et les rapporterait à des problèmes posés dans leur entier.

Il n'en a rien été.

Alors même que, comme l'indique brièvement le document organisateur de la concertation, sous l'intitulé La réussite scolaire pour tous, on trouve actuellement « 20% d'élèves de 15 ans en difficulté contre 15% il y a 10 ans » (le « socle commun » ayant été instauré en 2005, c'est avec les acquis des élèves qui avaient 15 ans en cette année 2005 qu'aurait dû être établie une comparaison transparente et loyale), la possibilité que le socle commun puisse être la cause même de cette dégradation, n'a jamais été évoquée. Les participants à la « concertation » n'auront jamais été invités à envisager la remise en cause du dit « socle commun », mais seulement à envisager sa « redéfinition ».

De multiples biais méthodologiques -qui ne peuvent échapper à personne- auront réussi à évacuer du Rapport de la dite « concertation » toute discussion. Le Rapport se flatte d'avoir pu « dégager, sous [nous soulignons: « sous »] l'inévitable et féconde diversité des opinions, un diagnostic partagé et des perspectives communes ». Mais, sur la diversité de ces opinions, sur les preuves de leur fécondité, l'on n'en saura pas plus puisque, si l'on est attentif à l'imagerie du Rapport, elles auront été traitées comme matériau superficiel, et finalement déblayées afin de mettre au jour le supposé « constat », supposé « commun », requis pour fonder un supposé « consensus ». Ce « consensus » est pourtant démenti par l'examen des contributions fournies même dans le cadre étroitement borné ici imposé. Le simple bon sens voudrait que l'unisson ne puisse naître du compte rendu rigoureux d'une « concertation ».

Mais il fallait un « consensus », quelque chose de plus fort encore que des « tendances sociétales lourdes » pour appuyer la décision gouvernementale de conserver, dans la loi de 2005, une notion politiquement stratégique.

 Il est profondément choquant que l'Exposé des motifs du projet de loi ose soutenir l'existence d'un « diagnostic partagé ». Il n'y a pas de « diagnostic partagé ». Il n'y a sous ce nom qu'une opinion, et de plus une opinion minoritaire, et dans le corps enseignant, et dans la Nation tout entière.

 

II .- SUR LE PROCESSUS LÉGISLATIF:

 

Aucun citoyen, a fortiori aucun fonctionnaire de l'État, respectueux de la Constitution de la République française, « une » et « indivisible », qui fait de l'organisation de l'enseignement public, gratuit et laïque à tous les degrés un devoir de l'État, ne peut ignorer que seule la loi peut garantir le caractère véritablement national de l'enseignement, ainsi que l'application uniforme du droit de recevoir l'instruction dans tout le territoire national.

 Un citoyen, un fonctionnaire de l'État, ne peuvent par conséquent que s'étonner de l'entreprise paradoxale formée sous le nom de « refondation », entreprise qui, comme le montre l'examen du Projet de loi, consiste, pour tout ce qui concerne le contenu de la formation scolaire et même son organisation, à ôter systématiquement des lois déjà codifiées une large part de ce qui y subsistait en matière de garanties nationales de l'égalité d'accès à l'instruction, à refuser désormais à ces garanties la force de la loi, tout en se gardant de remettre en cause le « socle commun ».

Le procédé essentiel de cette subversion consiste évidemment dans le dessaisissement du pouvoir législatif, au profit de l'exécutif.

Sont ainsi, notamment, ôtés du Code de l'Éducation:  la question de savoir ce que « comprend » le « socle », désormais entièrement tranchée par voie réglementaire (article 122-1-1 remplacé par l'article 6 du projet); les dispositions relatives à des « enseignements artistiques » dont le Code de l'Éducation précisait jusqu'ici qu'ils « font partie intégrante de la formation scolaire primaire et secondaire » (termes de l'article 121-6, remplacé par l'article 9 du projet, qui instaure, en lieu et place des « enseignements artistiques », une « éducation artistique et culturelle » supposant un engagement beaucoup moins contraignant de la part de l'État); le nombre des cycles et leur durée (parce que, selon le commentaire de l'article 24, qui abroge l'article 321-1 relatif aux  trois cycles de l'enseignement primaire, « il est prévu de repenser le nombre et la durée des cycles »; la loi cesse de préciser que la progression des programmes doit être « annuelle »: il suffira que cette progression soit « régulière » (article 311-1, remplacé par l'article 18 du projet). Toutes dispositions qui, quoi que l'on puisse en penser, constituaient autant de garanties du caractère national, donc juste et équitable, de l'enseignement.

De plus l'article 6 (qui remplace l'article 122-1-1) « supprime l'obligation légale » que l'acquisition du « socle commun » par l'élève « fasse l'objet d'une évaluation prise en compte dans la suite de sa scolarité ». Nouveau paradoxe! Dans le moment même où le Législateur désigne l'acquisition du socle commun comme l'objectif premier de la loi en préparation, il en soustrait l'évaluation à toute obligation légale! Inadéquation des outils d'évaluation -comme le suggère l'Exposé des motifs, ou inconsistance de la notion même de « socle commun »? Le Législateur se garde bien de répondre. Or des évaluations régulières des résultats obtenus par les élèves supposent elles aussi  que leur soit garanti le caractère national de l'enseignement qu'ils reçoivent. Par ailleurs, sans méconnaître ni la nécessité pédagogique de conserver les notations chiffrées classiquement pratiquées par le corps enseignant, ni la difficulté de la mise au point d'outils d'évaluation spécifiques, il est inutile de rappeler que des évaluations nationales permettent l'établissement d'enquêtes de comparaison, d'une année à l'autre, ou d'une région à l'autre: ces enquêtes n'étant plus  légales, l'État perdra la possibilité de redresser telle évolution négative. Il serait donc plus judicieux de maintenir ces évaluations, quitte à préciser ce que doit comprendre l'enseignement dispensé à l'école, puis au collège, et donc à remettre en cause le « socle commun », que de maintenir le « socle commun » et de supprimer les évaluations, qui, aux termes de l'article 6, perdent force de loi.

Mais le rédacteur du Projet de loi entend en revanche donner force de loi à certaines dispositions bien particulières.

L'article 27 du Projet de loi prévoit ainsi d'insérer dans le Code de l'Éducation une section entière relative à l'enseignement des langues vivantes étrangères, et, dans cette section, d'inclure un article (312-9-2) qui « rend un véritable enseignement en langue vivante obligatoire dès le début de la scolarité » et  donne « force de loi à cet apprentissage précoce », lequel,  actuellement, « ne relève que d'une mesure réglementaire ». Or le Rapport annexé explicite l'enjeu de ce passage du réglementaire au législatif: c'est que « l'école doit favoriser l'intégration des futurs citoyens français dans l'espace politique de l'Union européenne [...]» en participant « à l'atteinte des objectifs de la stratégie Éducation et formation 2020 » (ainsi qu'il convient peut-être de le préciser, il s'agit d'une « stratégie » du Conseil de l'Union européenne).

Quant à l'article 38 du Projet de loi, il prévoit que le conseil d'administration de l'EPLE se prononcera désormais « sur le contrat d'objectifs conclu entre  l'établissement, l'autorité académique et, le cas échéant, la collectivité territoriale de rattachement », au lieu de se contenter d'en informer la collectivité territoriale de rattachement [nous soulignons: « et, le cas échéant, la collectivité territoriale de rattachement » ainsi que « informer »].

Et c'est à propos de la réforme des rythmes scolaires que Machiavel passe aux aveux: selon le Rapport annexé, cette réforme « doit agir comme un levier pour faire évoluer le fonctionnement de l'école autour d'un projet éducatif territorial ».

Une telle entreprise n'impose qu'une apparence, quand elle ose se réclamer de l' « école de la République »: en réalité, par la loi dite de « refondation » se retrouve presque anéanti   le cadre des dispositions légales capables de garantir aux élèves de la République française le caractère national de l'enseignement qu'ils reçoivent; la puissance d'intervention du Conseil de l'Union européenne et celle des collectivités territoriales se retrouvent, elles, accrues à l'infini. Soulignons en outre que cette loi n'est qu'une « étape ».

L'école de la République n'est pas « refondée », elle  est mise en pièces.

 

III.- SUR DES RISQUES INACCEPTABLES:

 

III-1.-Il faut dire « non » à l'arbitraire:

 

« Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime, et la loi qui affranchit ».

De l'affaiblissement de la loi résulte l'arbitraire, puisque tout ce qu'aurait dû trancher le Code de l'éducation  se trouve maintenant annoncé voire tranché dans le Rapport annexé, lequel se présente comme un  ramassé -en soi instructif- de prescriptions générales ou de mesures plus précises censées correspondre aux perspectives tracées conformément au prétendu « diagnostic partagé ». L'on ne sera pas étonné d'y reconnaître les préjugés du supposé « consensus »: on y remarque notamment des pans entiers de l'une des contributions fournies dans le cadre de la concertation.

Or l'arbitraire est révoltant, et contient le risque, inhérent à la stratégie choisie pour la conduite du processus en cause, d'un conflit majeur.

 

III-2.- Il faut dire « non » à la remise en cause des concours nationaux ouverts du CAPES et de l'agrégation:

 

Le risque est immense.

Dans la République française, les conditions du recrutement et de la formation des professeurs sont actuellement définies par un système complet de lois, de décrets et d'arrêtés, qui développent de manière cohérente une certaine idée, juste et efficace,  du professeur comme de celui qui, parce qu'il enseigne dans la ou les disciplines qu'il a étudiées à fond, instruit et fait acquérir le savoir.

Or, bien que  la « professionnalisation » qui caractérise la réforme entreprise présente, selon les commentateurs officiels, un caractère radicalement « neuf », marque une profonde « rupture », de nature à porter atteinte à tout l'appareil des normes en vigueur (dont font partie le statut général de le Fonction publique de l'État, les statuts particuliers des corps de l'enseignement, qui définissent les conditions d'inscription aux concours, et les obligations de service, mais aussi, notamment, les décrets et arrêtés relatifs aux diplômes), dans le Projet de loi, les Dispositions relatives aux personnels tiennent en cinq articles (41 à 45) qui se rapportent exclusivement aux écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE), à leurs missions et à leur fonctionnement. Bien loin qu'un quelconque engagement ait été pris d'un exposé complet de la réforme avant l'examen de la loi par le Parlement, aucun éclaircissement n'est apporté quant aux conséquences de la réforme sur l'appareil législatif et réglementaire actuellement en vigueur. Si l'on se réfère aux comptes rendus, publiés dans l'internet, des réunions organisées au Ministère à l'usage des organisations professionnelles, de multiples et importantes  questions  restent sans réponse précise, comme relevant de « la prochaine étape » de la réforme.

Il est inacceptable pour un citoyen que la Représentation nationale soit mise dans l'obligation de légiférer à l'aveugle. Le Parlement, la Nation tout entière,  doivent disposer, avant l'examen du projet de loi, d'un exposé complet de la réforme entreprise, dans toutes ses conséquences.

Chacun doit pouvoir juger des risques auxquels la réforme expose les concours véritablement ouverts que sont actuellement, et que doivent être, par définition, les concours externes.

Car d'une part, l'insistance mise sur la progressivité de la « professionnalisation » de la formation des futurs professeurs fait comprendre que, dès leur entrée en formation, ils participeront certainement à l'enseignement -en échange sans doute d'une rétribution honteusement basse (cf. les 900€, bourse comprise, des emplois d'avenir professeur)-  de sorte qu'ils ne disposeront pas du temps nécessaire pour étudier à fond dans la ou les disciplines des concours. Et d'autre part, « pour assurer une cohérence entre les enseignements dispensés et la formation des enseignants », le Conseil supérieur des programmes qui sera créé (ou recréé, le HCE étant supprimé) donnera « un avis sur la nature et le contenu des épreuves de recrutement d'enseignants ». Le Rapport annexé confirme que « le cadre national des formations et la maquette des concours de recrutement », élaborés conjointement par les deux ministres, « seront fondés sur une plus grande prise en compte des qualités professionnelles des candidats et sur le développement de savoir-faire professionnels ».

Les « concours » de recrutement évoqués dans le Rapport annexé s'annoncent par  conséquent comme des concours ajustés aux conditions de scolarité des élèves des ESPE, comme des concours, sans doute non officiellement réservés, mais de facto fermés.

Les concours de recrutement doivent rester ouverts et nationaux. Il y va du respect de l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen. Il y va de la justice de la sélection qui doit être opérée parmi les meilleurs des étudiants à l'échelon national. Il y va de la mixité sociale du corps enseignant, que rendent possible et même favorisent, contre le préjugé à la mode, des épreuves portant sur des disciplines, mais que compromet gravement la « professionnalisation ». Car des concours ouverts, tels que le concours externe de l'agrégation, attirent des candidats d'origines très variées, étudiants de toutes les origines sociales (une étude conduite dans le cadre d'un rapport sur le fonction enseignante dans le second degré avait montré que l'origine sociale des lauréats de l'agrégation était plus modeste que celle des maîtres auxiliaires), professeurs certifiés issus du CAPES externe ou du CAPES interne, professeurs des lycées professionnels, fonctionnaires d'autres administrations, militaires, collaborateurs du secteur privé industriel ou commercial, Français ou Étrangers, ressortissants de l'Union européenne et leurs conjoints qui peuvent être nés dans le monde entier, ressortissants des pays, notamment africains, historiquement liés au destin de la France (tous très attachés au système français des concours qui oppose un obstacle efficace à toute discrimination). Que l'on veuille bien se reporter à l'admirable éloge des concours nationaux « aux places » développé par Diderot (après l'instauration par la France de plusieurs concours nationaux, dont celui de l'agrégation en 1766), dans ses admirables Mémoires pour Catherine II, et l'on y trouvera un modèle de ce qu'un concours externe, un concours véritablement ouvert et« aux places », pouvait, selon le philosophe, apporter à un État qui se modernisait en cultivant la justice, dans le cadre d'une politique européenne bien comprise. L'argumentaire du philosophe reste entièrement d'actualité.

Oui, il faut maintenir les concours nationaux externes, ouverts, du CAPES et de l'agrégation. Oui, il faut que ces concours restent des concours « aux places », et que l'attribution d'un poste par l'État soit garantie à leurs lauréats. Oui,  il faut maintenir et respecter les statuts particuliers des corps de l'enseignement. Oui, il faut respecter la liberté pédagogique qui résulte des droits et devoirs constitutifs de  ces statuts.

Car toutes ces dispositions n'ont d'autre fin que de garantir la transmission du  savoir dans des conditions qui assurent un égal accès des élèves à l'instruction dans tout le territoire national. À moins d'une renonciation honteuse à ce devoir de l'État, il est nécessaire d'assurer également que cette transmission sera soustraite à toute pression exercée par des pouvoirs, institutionnels ou non.

 

III-3.- Il faut obtenir la remise en cause de la notion de «socle commun»:

 

L'expression de « socle commun » est évidemment très habile, dans sa fonction a priori culpabilisante à l'égard de tout contestataire,  soupçonné ipso facto de frilosité sociale. Elle n'est cependant pas suffisamment habile pour faire oublier qu'elle impose une interprétation pédagogique de préoccupations d'un autre ordre: économiques (surtout dans le cas des relations avec les collectivité territoriales), ou politiques (en tant que l' « École du socle commun » correspond à une renonciation implicite  au caractère régalien de la politique scolaire, au profit de concessions sans fin aux directives et recommandations de l'Union européenne).

Mais le « socle commun » est aussi une notion pédagogique.

Faire en sorte que tous les élèves de 15 ans aient acquis un ensemble de connaissances définies comme indispensables constitue une préoccupation légitime.

Encore faut-il que l'instruction de tous coïncide avec le développement maximal des capacités de chacun, et que soit définie une véritable instruction, c'est-à-dire une  progression, suivant des programmes nationaux et des horaires nationaux correspondant à la spécificité des années et des degrés de l'enseignement. Il faut que le caractère propre de l'enseignement du second degré, qui doit continuer de commencer dès la classe de sixième du collège, soit respecté.

Mais si le Projet de loi, son Exposé des motifs et son Rapport annexé ne sont, certes, pas avares d'assurances, ils ne s'engagent à aucun moment à l'égard des mesures institutionnelles concrètes propres à garantir à chacun le plein développement de ses facultés.

C'est que les « compétences » ne sont que le cache-misère d'une ambition minimale.

Ainsi l' « École du socle commun » est-elle  radicalement injuste, parce qu'une école qui n'instruit pas chaque élève au mieux de ses possibilités est radicalement injuste.

Ainsi rien n'est-t-il moins « commun » que l' « École du socle commun », ni plus incompatible avec la rencontre, dans un  creuset social, des élèves de toutes origines sociales. Sachant bien où se procurer les compléments indispensables, les familles  averties soustrairont leurs enfants à un régime  scolaire perçu comme insuffisamment stimulant, à condition qu'elles soient assez riches pour enrichir les organismes de soutien scolaire. Quant aux enfants des familles pauvres, ils comprendront en grandissant -et avec quelle amertume justifiée!- que leurs chances de développement personnel auront été sacrifiées à un préjugé, alors qu'il aurait fallu leur permettre de constater par eux-mêmes que leur droit de s'instruire était garanti par la loi, comme ce fut le cas de la loi du 28 mars 1882, dont l'article premier commence ainsi: « L'enseignement primaire comprend: l'instruction morale et civique; la lecture et l'écriture [...] ».

Sans des engagements précis, définis par la loi, aucune école ne peut prétendre offrir un creuset social.

 

 

III-4.- Le Projet de loi doit être retiré:

 

Il faut que l'organisation de l'enseignement scolaire soit définie par la loi. Mais, après avoir refusé a priori de remettre en cause la notion du « socle commun », le Projet de loi rejette hors de la loi une large part des dispositions qui continuaient de garantir le caractère national, donc juste et équitable, de l'enseignement dispensé aux élèves. Il expose à des risques inacceptables l'institution fondatrice de la République des concours nationaux ouverts, au premier rang desquels l'agrégation externe.

Ce Projet de loi doit être retiré.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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